Rome

Italie – Rome – Du 23 au 26 mai

 

Lettre à une vieille amie

 

            Rome c’est la ville éternelle. Une ville qui a marqué l’Histoire comme peu de villes peuvent s’en vanter. Rome c’est aussi pour moi (Aurélien) une histoire personnelle. De septembre 2011 à janvier 2012 j’ai eu la chance d’y vivre en tant qu’étudiant Erasmus, y vivre réellement mon premier désir de l’étranger.

            Nous y sommes arrivées par bus, à la gare routière de Tiburtina (souvenir de mon amie Gaëlle cherchant une adresse de collocation sur cette interminable avenue). Nous rejoignons très vite le Circus Maximus, à côté duquel nous dormons. Orlando, le chef des lieux, nous montre une carte avec les lieux à voir. Je lui dis avoir vécu ici, mais il continue. Je ne l’écoute pas, mes yeux, plongés dans les noms de la ville, reconnaissent instantanément tous ces lieux, ces petites rues. Tout est resté présent dans ma mémoire. Rome ville éternelle.

                Je fais découvrir la ville à Barbara en passant par la Place d’Espagne puis par la fontaine de Trévi, qui sont chargées de touristes. Malgré la cohue, nous en profitons pour regarder cette belle œuvre baroque de Salvi. On se dit qu’on reviendra le soir espérant qu’il y ait moins de monde. Nous poursuivons vers le Panthéon. Si à l’origine il s’agissait d’un monument grecque, il a ensuite été transformé en Église au VIIèmes siècles (sainte Marie des Martyrs). Bien que sa décoration intérieur soit d’une simplicité rare, la forme parfaite circulaire de l’ouverture sommitale est fascinante. Elle est encore plus les jours de pluie, à travers laquelle les perles d’eau semblent ralentir leur course une fois dans l’enceinte. L’édifice a notre préférence. Dans la foulée nous rejoignons la place Navona, célèbre grande place ovale où de nombreux peintres s’installent. C’est une place très belle, où siègent plusieurs fontaines avec sculptures. L’église Sainte Agnès est à voir.

                Comme nous étions proche du fleuve, le Tevere, nous avons continué de l’autre côté vers la place Garibaldi. On la rejoint par des rues montantes, elle offre un superbe point de vue sur la ville. Nous y arrivons un peu avant le couché du soleil, les façades de la ville se parent d’or alors que nous nous amusons à trouver les monuments. La nuit vient, nous redescendons vers le Trastevere. Vieux quartier de Rome, autrefois populaire, qui a gardé son charme d’antan. De nombreux restaurants y sont installés avec des petites loupiotes, les lierres grimpant aux murs renforcent le charme des lieux. Je propose à Barbara de lui offrir le repas à la pizzeria Dar poeta (probablement les meilleurs pizza de Roma). Nous nous perdons un peu pour y aller. C’est plein, à grande majorité par des romains. On attend un peu et une place se libère. C’est une cantine italienne comme on peut l’imaginer, ça vit, ça parle fort et on y mange bien. La pâte cuite au feu de bois a vraiment quelques chose de spécial.

                    Pour revenir au centre, nous sautons dans un bus au hasard. C’est comme ça à Rome. On s’arrête Place Venezia pour remonter l’avenue des Forums, lieux d’histoires que la nuit rend encore plus mystérieux. Des gradins sont installés sur l’avenue, les italiens préparent leur fête nationale pour le 3 juin. Au bout de l’avenue, toujours debout : le Colisée. Le sommeil nous gagne, nous rentrons avec ses belles images sous les paupières.

                 Nous sommes arrivés au Vatican à 7h15 pour pouvoir voir les plafonds et de la chapelle Sixtine et la Basilique Saint Pierre. Il y a déjà une grande file d’attente. 1H plus tard nous entrons dans le plus petit état du monde… Pour rien, la basilique est fermée. Je demande à quelle heure elle ouvre « 13h. Ce matin Donald Trump est le Pape font une allocution ». What?!! Thank you M. Trump, we appreciate… Il est 8h30, tant pis pour la Basilique. Nous faisons les musées du Vatican. Ce sont des successions de collections de statues (dont plusieurs ont eu droit à un cache sexe en feuille de vigne sculptée, des horreurs qui gâchent les œuvres originales), toiles de peinture, tapisseries, cartes du mondes, poteries de diverses époques. Également il y a les chambres de Raphaël. Si le génie du peintre est incontestable, notamment au travers de sa composition et sa maîtrise du geste. Nous sommes d’accord sur le fait qu’il manque quelques chose à ses œuvres, c’est trop immobile et cela empêche l’émotion d’en ressortir (d’autant qu’il ne peut s’empêcher de se dessiner en autoportrait comme beaucoup d’artistes de l’époque).

              Arrivés à la Chapelle Sixtine, le contraste est saisissant. Le plafond et le lointain peints par Michel-Angelo sont au contraire de Raphaël pleins de volumes. Le mouvement des personnages est à fleur de toile. La force expressive est là, dans cette impression que le geste apparaît sous nos yeux. Plus nous restons, plus la force expressive est présente, troublante. C’est là aussi la force de Botticelli (car certaines scènes autour de la salle sont de lui), mais dans une autre mesure. Le mouvement y apparaît comme au ralenti, laissant apparaître l’instant de beauté et de grâce de la scène peinte. Le plafond de la chapelle Sixtine est (pour nous) la plus belle et remarquable œuvre que nous ayons vu au Vatican. Les personnages de Michel-Angelo ont été habillés à sa mort. Comme les sculptures, le Vatican a changé les œuvres pour quelles soient plus moral en masquant les corps nus… Vous pensez bien que c’est plutôt un sacrilège de changer un tel chef-d’œuvre. Mais lors de la dernière restauration, (qui a permise la redécouverte des couleurs du plafond) les ajouts de vêtements ont été enlevés pour rendre à l’œuvre son originalité, seuls les ajouts les plus anciens sont restés.

                  Au retour, direction Via Machiavelli. La rue où j’ai habité. Trois changements principaux, le café de où je prenais les ristretto avant d’aller à l’Université n’est plus, le restaurant d’en face est devenu un restaurant chinois, et le cybercafé un coiffeur. Sur la place Vittorio Emanuele, nous prenons des sandwichs à Gatsby (nouveau lieu m’apprendra Chiarà). La serveuse a le sourire chaleureux typique des romains. Nous nous régalons, mais le meilleur est à venir. Le dessert, une glace à Giovanni Fassi. Ma deuxième maison à Rome. Le meilleur glacier de Rome et du monde ! Les parfums y sont excellents, explosifs de saveurs, parfaitement équilibrés . Et cela pour 2 euros ! Vous avez un cône moyen (ou une coupe) avec trois parfums et de la pana. La pana, c’est ce nuage de crème que vos papilles n’oublieront jamais. Rome ville du goût éternel !

                 Après cet excellent repas, nous visitons l’Église Santa Maria Maggiore. Si elle impressionnante par sa taille (c’est l’une des quatre églises majeures de Rome avec la Basilique Saint-Pierre, Saint Jean de Latran et Saint Paul hors les murs), elle n’est pas ma préférée. Sa décoration intérieure manque cruellement d’inspiration religieuse. Son plafond par exemple pourrait être celui d’un palais sans lien avec le catholicisme. A la sortie, j’essaie de retrouver une église dont le bâtiment qui paraissait en ruine et plus remarquable (notamment le vestibule d’entrée). Mais mes souvenirs sont imprécis cette fois. Nous rentrons. Je m’informe auprès de mon amie Chiarà si nous pouvons nous voir, son travail la retient. Nous remettons ça à demain.

              Ce nouveau jour commence avec un réveil aux alentours de 7h du matin au son des claquements de la porte de l’immeuble. Aujourd’hui, cela sera le palatin/forum et le Colisée. Mais avant cela, j’amène Barbara vers un lieu amusant de Rome. Sur le côté du Circo Massimo (opposé au palatin), il faut remonter le long du jardin des roses. Passer devant le jardin des orangers (lieu très agréable et offrant un des point de vue les plus doux sur la ville). Après Sainte-Sabina, on arrive à la place des Chevaliers de Malte. Un grand mur blanc sculpté et deux portes noires. Le trou de la serrure, par lequel on glisse son regard, donne à voir l’allée centrale d’un jardin avec au lointain la coupole de la Basilique Saint-Pierre.

             Après ce détour, cap sur le palatin et le forum, grands sites archéologiques, vestiges de l’Empire romain. L’entrée latérale (depuis le Colisée en allant vers le Circo massimo) a généralement une faible file d’attente. C’est bon à savoir d’autant que c’est le même billet qui vous servira pour le Colisée. Nous prenons un audioguide (avec des écouteurs, un seul suffit pour deux) qui se révèlera une source d’information très fournie. Le lieu prend dès lors une autre dimension, des dates, des fonctions (comme par exemple les basilique qui servait en réalité de palais judiciaire). On regrette seulement qu’ils n’installent pas de petits visuels à côté de chaque monument pour mieux aider à se figurer l’édifice passé. Le forum était vraiment le point névralgique de l’Empire romain. Le palatin correspondait d’avantage à des résidences. Des fouilles ont encore lieu. C’est agréable de déambuler librement au milieu de ces témoins du passé, nous y passons plus de 3h.

                Pause à Gatsby et Giovanni Fassi (à 10 min à pied du Colisée en passant par le parc de Trajan). Et nous voilà rapidement dans l’arène romaine (grâce à nos billets du palatin). L’arène est impressionnante. Elle est très spacieuse, lors des spectacles le lieu devait frémir de bruits et d’agitations. Malgré tout, on sent qu’elle a été abandonné pendant de longues périodes (il y a même eu un projet d’y installer un église). Dorénavant la lutte n’est plus au centre de l’arène mais en son pourtour, dans les murs. Pour tenir debout encore et encore. Pour savourer encore plus ce lieux, nous nous essayons à le dessiner. Celui de Barbara est superbe, le mien ressemble à un gâteau…

            20H50, nous attendons Chiarà. Chiarà, c’est une italienne que Gaëlle (amie et colloque à Rome) avait rencontré. Deux-trois fois par mois nous embarquions avec elle découvrir les meilleures et insolites adresses de Rome (prendre un cocktail Moloko dans un bar semblable à Orange mécanique, manger un panino aussi grand que votre torse…) et des lieux secrets (comme la serrure). C’est avec tous ses souvenirs que nous attendons. Elle arrive dans une voiture (micra), se gare en double file à la romaine. Elle sort, on se prend instantanément dans les bras. J’ai l’impression d’être parti il y a deux semaines. Je suis si heureux de la retrouver. En voiture, la conversation se fait naturellement en anglais, français et italien. Elle est journaliste pour le cinéma. En route, c’est une aventure entre freinages soudains, virages rapides et demi-tours presque contrôlés. Le paradoxe italien, la conduite et la conversation, la nervosité et la tranquillité dans leurs meilleurs domaines. Je me souviens avoir vu le pare-choc de sa voiture endommagé, je comprends:) Mais au fil de la discussion et des rues, nous arrivons. Elle change ses chaussures pour des nus-pieds de soirées et nous y allons.

              Nous sommes à la Moma pizzeria romana. Gianpierro s’est joint à nous. Après des petits beignets de riz et mozzarella, nous commençons nos pizze accompagnées d’un délicieux vin blanc. La douceur romaine imprègne l’atmosphère. Vers la fin du repas, Chiarà nous parle d’un endroit magique où il faut absolument qu’elle nous amène, la Via Niccolo Piccolo mini, une rue de laquelle on voit la Coupole du Vatican. La particularité est que plus on s’approche de celle-ci plus sa taille diminue, et inversement, plus on s’en éloigne plus elle grandit…mmm…étrange cette affaire. Retour en voiture, le vin n’a pas amélioré la conduite de Chiarà mais Gianpierro veille ce qu’il peut. C’est sport, d’autant que ça tourne pas mal dans ces petites rues. Après deux rues en sens-interdits prises, un feu rouge grillé, trois stops ignorés, nous arrivons. « Guardate ! Guardate la magia ! ». Et en effet, au fur et à mesure qu’on s’approche de la coupole ses dimensions s’amenuisent !Perplexe, je fais le chemin à pied, l’effet marche aussi. Des jeunes font une fête, dans mon cœur ce moment est aussi une fête. En repartant, l’effet est encore plus impressionnant, la coupole devient monstrueusement grande et occupe toute la vue de la fin de la rue. (Après réflexion, il nous semble que c’est un jeu de perspective et d’inclinaison de la route, elle se rétrécie vers le bout et est plus haute. Ce n’est qu’une hypothèse). Elle nous dépose au Circus Maximus. On se tombe dans les bras, dans nos yeux toute la bienveillance réciproque. On n’est pas triste, nous savons que nous nous reverrons. Merci Chiarà, merci pour tout. La vie italienne et ses merveilles prennent tous leurs sens avec toi.

           Si tous les chemins mènent à Rome, ce n’est pas seulement à cause du Domus Aurea (ancienne colonne d’or située dans le Forum romain) d’où partait les trois principales voies de l’Empire romain dont l’une d’elle était la Via Aureliana, (signe?), c’est que les plus belles aventures y commencent. Je suis prêt. Rome ville éternelle de l’Humanité et de mon cœur d’homme.