Macédoine

Macédoine, de la fin du 06/07/2017 au 09/07/2017 / Skopje / Ohrid / Bitola

Inattendue Macédoine

                     Nous avons quitté Pristina (capitale du Kosovo) à 17h dans un mini-bus en direction de Skopje (capitale de la Macédoine). Toujours à l’intérieur, nous sommes sur le point de rentrer sur le territoire macédonien…

               La frontière se passe sans encombres pour nous. Alors que je discute avec le passager macédonien à mes côtés, je remarque que Barbara a quitté son siège défectueux et est assise seule sur une banquette pour deux. La rejoignant, elle m’apprend que le mini-bus est reparti sans deux des passagers qui sont restés au poste de douane à la frontière. Nous ne savons pas pourquoi. Rapidement nous arrivons à Skopje, ville qui a connu un très important bouleversement architectural avec le coûteux projet Skopje 2014 (nous reviendrons sur ce sujet qui semble diviser les macédoniens). Nous demandons de l’aide pour nous orienter et la réponse est avec le sourire. Nous traversons une petite partie du nouveau Skopje, de grandes sculptures et même un mini-Arc de Triomphe. Un bus rouge à deux étages, les mêmes que Londres, passe devant nos corps fatigués. Nous posons nos affaires à l’auberge de jeunesse. Après la douche, nous nous motivons pour un dernier effort de cette longue journée (car nous n’avons pas beaucoup dormi depuis le bus la nuit dernière, cf article Kosovo), pour aller voir à la nuit tombante cet intriguant Skopje 2014.

                   Très vite nous sommes dans le nouveau centre, une statut géante du guerrier à cheval (pour ne pas nommer Alexandre le Grand, car c’est en réalité une copie…) se tient cambré sur une colonne massive et sculptée. Autour des lions se tiennent droits, des jeux d’eaux de leurs gueules de fauve et des lumières complètent le tout. La fontaine comme les sculptures sont très impressionnantes par leurs tailles. Les bâtiments nouveaux sont plutôt de bon goût. C’est grand, spacieux et propre. Les réverbères sont imposants. Le tout donne une impression de ville monumentale, alors que ce n’est qu’une faible partie de la ville. Nous allons manger sur la promenade touristique, face aux immenses bâtiments néo-classiques du musée d’Archéologie et de la Poste. Ce n’est pas succulent, mais nous goûtons à des spécialités comme le tarantur (pour le coup très décevant). Les ponts, bordés d’une succession de sculptures, traversent la rivière presque à sec. Cela crée un bel effet, mais sur l’un d’eux, en s’approchant on découvre par exemple un chanteur en gilet et avec un micro, ça devient… surprenant dirons-nous. Sans parler des deux immenses restaurants-bateaux pirates posés sur les filets d’eau éparses du Vardar (fleuve de la ville). Peut-être sommes nous trop fatigués pour bien apprécier.

            Après une bonne nuit de sommeil, les idées à nouveau fraîches, nous partons nous promener dans ce nouveau Skopje. Lors de mon échange erasmus à Rome en 2011, mes colocataires macédoniens Bessim et Mennan m’avaient parlé de ce projet « fou » financièrement du gouvernement (aujourd’hui il s’élèverait à 800 millions d’euros). En 1963, un tremblement de terre avait détruit une grande majorité de la ville. Dès lors, l’idée du gouvernement macédonien est de doter à nouveau la ville de bâtiments administratifs et culturels dignes du rang d’une capitale. Et de mettre en valeur le passé et présent de la culture macédonienne (d’où la sculpture du chanteur). Notamment, pour les petits souvenirs scolaires, le pays a été la patrie du roi Phillip II, père du fameux macédonien Alexandre le Grand. Ce dernier avait bâti un immense empire au 4ème siècle avant J-C en un temps éclair (il est mort à 33ans).

           Revenons à la ville. Dans les faits, cela donne une débordante surabondance de sculptures aux styles différents. On passe du néo-classique à des formes plus contemporaines, de la figure antique à une nageuse prête à plonger dans le Vardar, du religieux au mendiant. Il y en a partout, de tout, dans une faible densité de mètres carrés. C’est parfois réussi, comme le pont aux sculptures classiques, qui a un côté majestueux, ou les sculptures des fontaines qui sont très belles, bien qu’elles manquent un peu de caractère. Les nouveaux bâtiments resplendissent d’un blanc immaculé au dessus de ces ensembles. Parfois, cela verse dans le c’est vraiment trop. La quintessence étant atteinte lorsqu’une petite musique baigne un ensemble de fontaines et sculptures. Là, on se sent vraiment comme dans le fameux grand parc d’attractions de la célèbre souris aux grandes oreilles noires. Nous filons dans le souk de la ville, près de l’ancienne forteresse. Petites rues qui alternent marchands et restaurations rapides. Nous prenons du recul alors que les micros des minarets crépitent au sons des premières sourates. Leurs sons sont plus élevés qu’en Bosnie-Herzégovine. Les hommes commencent leurs prières dans des rues entières.

          Nous repassons par le nouveau Skopje, cette fois par le Théâtre qui est toujours en construction. De l’extérieur il est décoré d’une multitude de sculptures évoquant les différents arts scéniques. C’est original, nous espérons que la salle accueillera des spectacles. Si nous comprenons la volonté de doter à nouveau la ville de bâtiments administratifs et culturels dignes d’une capitale, l’excès décrédibilise le geste. Il donne une impression las vegasesque, de faux aux belles apparences à la totalité. En plus de nombreuses sculptures sont en réalité des copies. D’autre part, il y a les bus typés londonien, le mini-arc de Triomphe… Alors qu’une moindre multitude, ou plus dispersée dans la ville, donnerait plus à apprécier toutes ces œuvres. D’ailleurs, quelque chose d’autre nous gêne. L’architecture, comme l’Art, n’est jamais neutre. L’organisation urbaine d’une ville est un choix politique, son plan architectonique son affirmation absolue. Après lecture de quelques interviews des acteurs du projet, la volonté qui en ressort est de glorifier principalement le passé culturel macédonien. Dans ce nouveau Skopje nous n’avons vu aucun témoignage de la période ottomane du pays, alors que des sculptures de religieux chrétiens oui. Alors que par exemple l’importante communauté albanaise du pays est majoritairement musulmane. Notre manque de connaissance historique du pays ne nous permet de juger de rien, mais notre simple regard extérieur nous fait remarquer certains « oublis ». La Religion est un sujet qui peut facilement diviser.

          De retour à l’auberge, nous discutons avec le monsieur qui est aujourd’hui à l’accueil. D’abord hésitant à se confier, il nous confirme que ce projet est majoritairement rejeté par les macédoniens. Trop coûteux alors qu’aucune réelle politique d’emploi et sociale ne sont menées pour le peuple. Les jeunes diplômés partent faute de travail. Il nous conseille la visite du canyon de Matka, mais nous n’aurons pas le temps. Et puis nous venons de réserver notre chambre à Ohrid, notre prochaine étape. Il nous met en garde, il n’a pas le mot en anglais, il nous fait des signes de la main qu’il y a des … « vagues ? » « No » … « tremblements de terre ? »  « yes ! » « Quoi ???! » « Vous n’avez pas entendu, en ce moment là-bas il y en a plein tous les jours. Si j’étais vous, j’irai plutôt au canyon ». Sauf que nous venons de valider notre réservation là-bas. Après renseignements, aucun mort ni de dégât matériel. Rien de grave exceptées des secousses quotidiennes. Nous lui demandons si c’est normal, il nous répond : « première fois de ma vie qu’il y a ça là-bas ». Nous ne trouvons aucune information évoquant un grand danger d’y être. Nous tenons à y aller, premièrement pour le lac qui borde le village (certainement le plus vieux d’Europe et le 2nd plus profond du monde), deuxièmement pour un festival de danse traditionnelle des balkans.

           En retard, nous choisissons le bus. Sur la route nous prenons plus d’informations. Ce site est classé patrimoine mondial de l’UNESCO pour le côté macédonien (de l’autre côté c’est l’Albanie), notamment pour son écosystème. Par exemple, parmi toutes les espèces qui habitent le lieu, plus de deux cents se trouvent uniquement là-bas. Peu de lieux sur terre ont la reconnaissance de l’UNESCO à la fois pour sa faune et son architecture. Cependant le gouvernement entend développer de grands projets pour accroître l’attrait touristique de la ville. Après plusieurs visites (2014, 2016) et mises en garde par l’UNESCO, Ohrid pourrait perdre son statut de patrimoine mondial dès 2019. Dans nos investigations, nous apprenons aussi qu’un projet controversé d’autoroute a commencé il y a à peine un ou deux mois. Concomitance avec les tremblements de terre, coïncidence… ? Pendant ce temps, sur cette route de montagne le jour se couche lentement.

          C’est avec le ciel couvert de son manteau de nuit que nous arrivons à la gare routière. Il est 22h, nous craignions d’arriver trop tard pour notre chambre. On s’égare un peu, une mamie dans son jardin s’approche du portail et nous remet dans la bonne direction. Plus loin, un homme d’une quarantaine d’années prend l’initiative de nous préciser notre point d’arrivée. Nous sommes agréablement surpris de tant de gentillesse. C’est avec la même attention que nous sommes accueillis par la famille chez qui nous avons loué la chambre. Sourires et chaleur humaine. Au 3ème étage, la chambre est à l’ancienne, avec seulement l’espace d’un petit passage sur le côté du lit. Petit bonus, il y un balconnet. Nous nous couchons… avant d’être réveillés à 1h du matin. Un gros ronflement souterrain remonte vers la surface et nous secoue assez énergiquement. C’est bref, 3-4 secondes. Les stores en métal cogne contre la vitre, accentue de manière sonore ce qui se passe. C’est une secousse, le premier tremblement de terre que nous vivons. C’était très court, rien n’est tombé par terre. Aucune voiture ne sonne. Rien n’a bougé, seulement nous qui sommes quelque peu ébahis des sensations. De plus loin sous terre, nous sentons de nouvelles ondes qui viennent refaire vibrer la chambre, moins fortes et toutes aussi succinctes. Une troisième vague, mais l’énergie a clairement diminué d’intensité cette fois. Enfin une quatrième qu’on qualifiera de clapotis. On s’interroge si nous devons rester. Alors on passe la tête dehors, la vie continue ordinairement, les clients sortent de la boulangerie restée ouverte. Nous faisons comme eux, nous nous rendormons de manière anodine.

       Le soleil baigne de tous ses cheveux d’or notre petit-déjeuner sur le balconnet. Ils nous accompagneront toute la journée. Nous descendons jusqu’au bord du lac. Sa couleur est d’un bleu très foncé au loin, avec une profondeur qui ferait croire à un saphir. Aux abords l’eau est translucide. En face c’est l’Albanie. En longeant la rive, tous les bateaux-taxi nous hèlent pour une virée sur l’eau bijou. Nous déclinons et rentrons dans la vieille ville, les murs de pierres et les rues pavées nous accueillent. Nous voyons les premières maisons de construction typique d’Ohrid, étroites à la base, s’élargissant avec le deuxième étage et encore plus avec le troisième. A un point d’informations, nous sympathisons avec le vieux monsieur. Dans une franche rigolade, nous rafraîchissons son français oublié. Nous arpentons la ville pleine de charme des anciens temps. Les fleurs rendent encore plus séduisantes les ruelles. Les vieux modèles de voitures s’y mettent aussi, on s’amuse à essayer de reconnaître les modèles que nous n’avons pas connus. Nous passons l’église Sainte Sofia. Nous demandons où seront jouées les danses du festival. Nous trouvons l’endroit, de manière étonnante ouverte au public. La console son sous une épaisse couverture pour protéger du soleil, l’installation technique simple. On peut faire le tour de la scène (on pourrait même y grimper), voir les chaises où attendront les danseurs en coulisse (avec vue sur le lac). Nous reviendrons ce soir. Nous enchaînons jusqu’à l’ancien théâtre antique de la ville. Les techniciens y préparent l’installation pour accueillir des concerts l’été, nous sentons que nos métiers du spectacle vivant nous manquent. On poursuit, dans un parc on rencontre la première tortue sauvage de notre vie. Elle grimpe une sacrée montée, l’agilité de ses petits pas nous fascine. Nous ne sommes pas loin de la forteresse Samuel (mon père nous l’avait bien caché 🙂 alors nous y faisons un petit tour. Il ne reste que les murailles du haut desquelles on admire l’étendue du lac, un gigantesque drapeau macédonien et dans un moindre goût la nouvelle ville bétonnée.

           Le soir, nous sommes en avance au spectacle, pour rien car il y a largement la place. Les trois groupes arrivent au son d’un gros tambour, respectivement la Serbie, Ohrid et la Bulgarie. Ils font les balances (réglages de sons) en public juste avant le spectacle. L’installation lumineuse est sommaire, des projecteurs simplement réglés à pleine puissance en direction de la scène. Le stress est palpable dans les groupes. L’accueil technique est presque amateur, ce qui attendrit nos cœurs professionnels du spectacle vivant. Nous frémissons, nous sommes frustrés. Nous voudrions encadrer la soirée, mettre de l’organisation dans l’événement, rassurer les danseurs. De ne pas pouvoir intervenir nous pince le cœur. Le groupe serbe ouvre la soirée. Une chanteuse à capella fait le silence avec sa voix aussi limpide que l’eau du lac. Nous sommes subjugués. Les ballets de danse traditionnelle s’enchaînent. La Serbie, suit le groupe d’Ohrid et enfin celui de la Bulgarie. L’énergie des groupes est belle (impressionnante pour le groupe serbe). Dans le Carnet de Spectacle nous reviendrons plus en détails. Nous sommes heureux d’assister à ce spectacle en plein air. Cela nous revitalise avant une nuit de petites secousses (qui maintenant nous amusent tant elles sont petites).

           Le 9 juillet, sous un soleil écrasant alors qu’il n’est que 10h du matin, nous allons nous placer sur la route pour commencer notre journée d’auto-stop. Notre objectif est de rallier Athènes à quelques 650km plus au sud. Nous devons arriver à Athènes le 11, nous avons un peu de marge. Nous y sommes attendus par Thomas, un américain qui doit nous héberger via couchsurfing. A la sortie d’un rond-point, équipés de nos pouces levés et de l’ardoise sur laquelle on a écrit Bitola (la ville qui nous rapproche le plus de la frontière grecque), on débute notre quête. Une petite dizaine de minutes plus tard, un couple à pied rigole à notre vue. Ils nous dépassent…eux aussi font du stop. Du coup ils se placent un peu plus loin que nous. Encore dix petites minutes, une petite voiture verte s’arrête. Alexsander a dans les quarante ans, les cheveux courts et le corps bien bâti. Il sort pour nous ouvrir le petit coffre dans lequel on met le sac d’Aurélien…sur des rangées de parpaings. Dans la voiture, nous partageons l’espace avec des traverses en bois. Il travaille dans la construction de maisons. Il nous signale la présence d’un volcan par l’odeur du souffre qu’il dégage, il évoque avec nous la rivalité historique avec la Grèce (qui ne reconnaît pas le pays et bloque son entrée dans l’Union-Européenne). Évidement nous lui posons la question des tremblements de terre, il nous répond : « Plus de 100 ces derniers 20 jours. C’est la première fois que ça arrive ! Je n’avais jamais connu de tremblement de terre avant. »… Cela semble très sérieux (dans le passé la ville en a déjà connu). Il ne va pas à Bitola mais nous a proposé de nous déposer sur le trajet, à quelques quarante kilomètres plus loin. Hélas sa voiture chauffe trop avant l’arrivée. Première que fois cela lui arrive. On doit s’arrêter sur le coté et laisser refroidir le moteur. Poliment, il nous invite à descendre pour que nous prenions une autre voiture (nos deux sacs plus nos corps plus les parpaings, la voiturette verte s’en est rendu malade). Il repart quelques minutes après.

           Et nous, et bien nous, nous sommes au bord d’une route de montagne, sous ce soleil d’été macédonien. Sans voiture qui passe, sans rien autour sauf de la végétation et des chemins de terre craquelée. C’est le fait parti de l’aventure. Un fourgon arrive, mais à l’intérieur le couple d’auto-stoppeurs croisé à Ohrid précédemment qui nous font signes et cris d’encouragement. Nous prenons cela comme un challenge ! L’incroyable se produit, cinq minutes après et quelques passages rapides de voiture, un véhicule pile devant nous. Les pneus crissent, deux hommes s’arrêtent. Ils ne semblent pas d’accord entre eux, mais alors pas du tout. Nous ne comprenons rien à part que l’homme côté passager, plus âgé, nous ouvre la porte et nous fait monter à l’arrière. On s’y entasse avec nos sacs. Leur désaccord continue sans réelles animosités, alors nous sortons notre carte du monde plastifié, c’est notre atout magique. Voyant le tracé de notre itinéraire, les deux rigolent et s’accordent en comprenant notre projet. Nous comprenons qu’ils ne vont pas vers Bitola mais en direction de la mer. La route se sépare juste après une poignée de kilomètres. Nous leur demandons de nous déposer à l’intersection, cette fois les deux s’excusent de ne pas nous avancer plus. Cela nous convient, il y a un stop sur l’autre route. Nous y arrêtons la première voiture qui va dans notre sens. L’homme de 40ans-50ans à l’intérieur hésite pour nous prendre, mais on insiste. Nous montrant notre atout magique, c’est ok ! Il s’appelle Yacha, les traits de son visage sont bruts. La peau foncée, ses cheveux noir charbonneux encadrent des yeux enfoncés et clairs comme l’azur. Il parle plusieurs bribes de plusieurs langues. En route nous croisons un cycliste, c’est pour nous de la folie de rouler avec de telles conditions. Dans la vie Yacha est taxi, mais nous ne demandera rien en nous déposant à la station-essence avant Bitola. Là, nous y voyons une dernière fois le couple auto-stoppeur qui s’éloigne à pieds. Égalité. Nous, tout contents d’être presque arrivés à la ville frontière, nous marquons sur notre ardoise : Athènes ! Quand il faut y aller il faut y aller !On fait rire la plupart des voitures qui passent…car Athènes est encore à 580km. On aura essayé ;D

           Le cycliste nous dépasse, nous l’encourageons de « Bravoooo » (habitude de la course à pied). Notre pancarte Athènes est sans succès véhiculé, nous nous décidons pour marcher vers la ville. Le jeune cycliste a fait demi-tour. Nikola vient à notre rencontre pour nous dire que nous ne sommes pas au meilleur endroit pour trouver une voiture grecque. Il nous conseille de traverser la ville, et mieux de nous accompagner sur la route qui va vers la frontière. Ce sont 6-7km de marche. En tant normal, aucun problème pour nous mais avec les sacs et le soleil toujours plus chaud, c’est plus compliqué. Néanmoins nous le suivons. Surtout que Nikola est très gentil, il nous accompagne à pied alors qu’il pourrait repartir en vélo. Il préfère rester avec nous. Avec lui nous parlons simplement, comme trois voisins parleraient de la vie quotidienne. On échange sur la situation de la Macédoine (lui en a marre qu’on parle de c’était mieux avant avec Tito, et aimerait que les gens aillent de l’avant). Il voudrait faire un projet comme le notre, mais en vélo. De notre âge environ, il travaille pour une compagnie américaine à Bitola, son anglais est parfait. Il nous apprend qu’il y un festival de Théâtre annuel, sur Shakespeare le To be or not to be ; un festival de cinéma international. Après plus d’une heure de marche nous faisons une pause dans un parc et nous nous disons au revoir. Nikola insiste alors pour nous offrir quelque chose à manger (il voulait déjà nous acheter de l’eau sur la route), il nous offre des papayes séchées qu’il a dans son sac en s’excusant de ne pas pouvoir nous donner plus. Pour nous convaincre d’accepter, il nous dit que sa maman lui en voudrait qu’il nous n’ait rien laissé à manger. Adorable ! Ta gentillesse était déjà un merveilleux cadeau, ton geste nous va droit au cœur. Merci !

          Nous nous asseyons dans le pire parc, pourtant celui de l’hôpital, que nous ayons jamais vu. Jonché de déchets de toutes sortes que les corbeaux prennent dans les poubelles et éparpillent ci et là. Entre eux, nous trouvons un banc pas trop sale sur lequel la dernière planche résiste à la chute. Nous apprécions les papayes séchées, elles nous font le plus grand bien énergétique et moral ! (Hvala Nikola!!!) Cela nous redonne des forces au corps et au coeur. Nous te souhaitons un jour de faire un très beau voyage sur ton vélo. Un peu de pain, du quinoa de la veille et quelques gâteaux font le reste de notre déjeuner. Nous repartons. Nous marchons encore trente minutes et nous trouvons la route que Nikola nous avait indiqué. C’est dimanche et les grecs viennent à Bitola pour faire des courses comme les toulousains vont au Pas de la Casa. C’est moins cher. Nous attendons pas très longtemps et une voiture grecque s’arrête. Marcellina et Adelina vont jusqu’à Florina, la ville grecque après la frontière. En route avec les premiers sourires du pays hellène.