Dream Community

Bienvenue à la Dream Community !

Résidence d’artistes

Dream Community (tous les dessous de balcons sont peints !)

            A travers notre voyage, dans la mesure du possible, nous essayons de concilier voyage et rencontres d’artistes. Quelle ne fut pas notre surprise en découvrant à Taipei, capitale de Taïwan, la Dream Community (ou en français Communauté de/du Rêve). Lieu singulier dans le monde de l’art de part son fonctionnement, nous avons pu prendre part à leur aventure un peu moins de deux semaines. Nous y avons effectué un workaway (ce qui signifie qu’en échange de notre activité nous étions hébergés et nourris). Dans ce laps de temps très court, nous avons essayé de rencontrer les différents membres de l’équipe afin de mettre en lumière les multiples parcours et personnes qui composent le merveilleux projet de la Dream Community.

           Brièvement, le projet est né de l’idée de Gordon Tsai. Ses parents étaient riziculteurs et avaient des terres à Shijr. La ville, à l’est de la capitale, était souvent inondée par la rivière Keelung, mais la construction d’une digue a permis d’empêcher ce phénomène et le développement d’habitations. C’est dans ce contexte d’urbanisation que Gordon Tsai a acquis plusieurs immeubles. Parallèlement, ce dernier a sillonné le monde, curieux des carnavals, festivals et parades. Il a visité de très nombreux pays, participé à ces manifestations culturelles toujours en étant costumé (ou ce qui semble sa spécialité en body-painting – le corps peint). Notons au passage que la sœur de Gordon a elle aussi effectué un long voyage en Europe, mais avec un fourgon cuisine. A son retour à Taïwan, Gordon a eu l’idée de crée la Dream Community. En quelques mots, parmi les immeubles qu’il possède, certains seront destinés à du locatif qui financeront deux autres faisant office de résidence artistique.

        D’autre part, le gouvernement de Taïwan souhaitait crée un événement national. La Dream Community saisit l’occasion de prendre les rênes de la Dream Parade pour en faire une grande déambulation carnavalesque. L’idée de base est d’offrir un espace festif de liberté d’expression, en réunissant à la fois les cultures locales (arborigènes comme les Hakka, chinoises…) et mondiales. Mais aussi en encourageant et accompagnant les autres villes de l’île à créer des chars. L’événement prend une place culturelle très importante dans le pays. C’est une des partie du projet de la Dream Community.

             Le principal versant de la Dream Community est l’accueil d’artistes. Quelques soit la spécialité, ce qui importe c’est le projet artistique. Lorsque la Dream Community accueille un-e artiste (environ 30-40 par an), ils réfléchissent à la création et son emplacement. Ensuite, en fonction de celui-ci, les moyens sont mis en place pour sa réalisation. Lorsque nous sommes arrivés nous avons été surpris par l’ingéniosité et la diversité des œuvres artistiques. Sculptures en tous genres et tous styles (en fer, avec récupération de métaux, en papier mâché, en bambous tressés, en verre…), peintures en tout lieux (sur les murs, sous les balcons…), décorations intérieures avec différents matériaux (mosaïques, polystyrène, bois…). Le lieu regorge de créativité pour le grand bonheur de l’émerveillement infini de Gordon Tsai, l’équipe de la Dream Community et des curieux qui viennent visiter. De plus chaque dimanche après-midi donne lieu à des manifestations en tout genre qui sont gratuitement accessibles pour qui vient. C’est d’ailleurs dans ce cadre que nous avons crée une petite forme de spectacle de rue. Ces après-midis sont faîtes principalement pour réunir les habitants du quartiers autour d’activités culturelles comme des spectacles ou des jeux.

         Impressionnés par tant créations, héritages des nombreux artistes passés dans le lieu, nous nous sommes directement intéressés à l’équipe actuelle. Notre surprise a encore était plus grande en découvrant la variété des profils, des personnalités, mais tous avec cette passion commune pour la Dream Community. Car s’il y a bien un point commun entre les membres, c’est ce sentiment privilégié et de bonheur d’appartenir à ce projet. Ce lieu leur donne les possibilités, chacun dans leurs domaines de compétences, de s’exprimer. En ce moment, le projet est porté sur les créations de plusieurs appartements-musées dédiés à des pays (il y a l’Inde, le Brésil, la France…), tous en cours d’élaboration au moment de notre venue, celui de l’Inde est particulièrement bien avancé.

Akash et Putu

        D’ailleurs c’est dans celui-ci que nous rencontrons Putu (indonésien) et Akash (indien). Nous pourrions qualifier le duo d’une certaine manière de Ying et Yang tant leurs caractères sont différents mais se complètent parfaitement. Putu est plutôt un artiste réservé, ancien sculpteur à Bali, il a beaucoup appris sur les techniques de sculptures sur différents supports (il travaille à la Dream Community depuis 6 années cumulées). A la différence, le musicien Akash est excentrique, quelqu’un qui aime rire et s’amuser dès que l’occasion se présente. La première fois qu’il est venu à la Dream Community, c’était pour son art de la musique (il joue du Tabla).

          Une des spécialités de Putu est la construction de figures géantes pour les carnavals. En ce sens, au début, la Dream Community l’envoyé lui et les autres indonésiens (au total ils sont quatre ingénieux artistes d’Indonésie capable de tout faire) dans les autres villes taïwanaises. L’objectif était qu’il enseigne ses savoir aux locaux en réalisant avec eux une construction. C’est d’ailleurs parmi ses meilleurs souvenirs ces moments de partages avec des personnes de tous âges, échangeant autour d’un projet sans parler la même langue ! A cette période, il faisait souvent équipe avec Wayam (un autre indonésien sur qui nous reviendrons plus tard). Dorénavant, les projets se concentrent d’avantage sur les bâtiments de la Dream Community. D’ailleurs c’est Jeffrey qui a réuni Putu et Akash. Jeffrey leur soumette l’idée de l’appartement indien. Si au début Akash devait restait trois mois, cela fait presque six mois qu’il poursuit l’aventure. Il ne s’en cache pas, il s’y connaissait très peu en construction et décoration. C’est Putu qui lui apprend les techniques qu’il connaît et qu’il a acquis au sein de la communauté. Avec Jeffrey, qui a maintes fois voyagé en Inde (pays pour lequel il voue une grande passion), ils réalisent des pièces fantastiques et très variées esthétiquement.

         Ce duo est un bel exemple de ce que la Dream Community permet de faire. Lorsqu’une personne propose une idée, ils réfléchissent à sa réalisation. Pour cela il y a une entraide formidable, chacun des membres les plus anciens ont acquis des techniques en expérimentant librement au sein du lieu, et ils sont ravis de les partager avec les nouveaux arrivants. Cela a d’ailleurs été une petite frustration pour nous tant nous aurions aimé resté plus longtemps apprendre auprès d’eux. De plus, comme ils accueillent des artistes de différentes sensibilités, cela confère aux lieux un hétéroclisme incroyable. Partout il y a des œuvres des artistes passés, dans tous les appartements (même ceux dont aucun projet n’a débuté), il est possible d’y voir au moins un objet par pièce (une sculpture, un meuble, un lustre, une peinture, une mosaïque murale…). A la Dream Community il y a une réelle volonté de créer et d’échanger pour apprendre toujours un peu plus chaque jour.

          Comme Putu, Bujar (Pecel) et Bujur sont indonésiens. C’est la troisième fois qu’ils viennent à la Dream Community. Ils forment ensemble avec Wayam (c’est lui qui leur avait parlé du projet), et Putu, les quatre indonésiens « touches à tout ». Ce sont des sculpteurs capables de donner forme à presque toutes les idées. Et signalons le, toujours avec un grand sourire et une gentillesse à illuminer la pluie taïwanaise. Leurs savoirs sont le fruit des multiples rencontres avec les différents artistes. Comme Putu, au début ils étaient missionnés à enseigner dans des villages la construction de sculptures géantes. Ce sont pour eux de supers souvenirs. La grande parade annuelle en est un autre. Bujar et Bujur travaillent en duo sur une pièce chinoise pour accueillir un événement prochainement.

           De son côté Wayam travaille d’avantage en ce moment avec Jerry (comme ils sont deux Jerry, nous le qualifierons celui-ci de « coordinateur général »), sur l’aménagement du rez-de-chaussée. Lui aussi nous parle avec grandes joies des souvenirs des ateliers dans les villages taïwanais. Ce point commun entre les quatre indonésiens met parfaitement en exergue le plaisir qu’ils ont à partager un savoir, leur désir d’apprendre de l’autre. Par ailleurs, Wayam nous explique que c’est avec Putu qu’ils ont conçu le char Bouddha en bambous, avec lequel ils défilent quelques fois à la parade. C’est un très beau char, très original. Au point qu’il a servi de modèle pour un char que la Dream Community a construit aux Etats-Unis lors de leur dernière participation au célèbre festival Burning Man. Les deux institutions ont d’ailleurs depuis peu un partenariat.

        Ainsi se déroulent les journées à la Dream Community, elles commencent à 9h avec une pause commune déjeuner à midi. Les plats sont délicieusement cuisinés par une cuisinière vietnamienne. Le dîner est à 18h. Entre chaque pause repas chacun évolue à sa mission. La nôtre fut de créer un spectacle. Du fait que nous étions présent peu de temps, nous avons fait le choix de créer un court spectacle de rue. Ainsi, nous passions clairement la plus part de notre temps dans le studio de danse. La Dream Community est bien équipé, car il y a également une petite salle de théâtre, une costumerie (où une dame à la retraite des assurances en conçoit de nouveaux costumes en recyclant divers objets), un restaurant (qui appartient à la sœur de Gordon, celle qui avait voyagé avec son fourgon cuisine), plusieurs lieux de stockages et d’ateliers.

Barbara présente à Gordon ses peintures murales

          Pour faire fonctionner tous cela, il y a bien entendu Gordon Tsai. Il est à la fois partout et nulle part. Il échange toujours avec les équipes sur les projets en cours. C’est un homme très simple d’approche et qui a une réelle passion pour la créativité. Pas seulement sous sa forme artistique. Par exemple Jerry est le jardinier. L’écouter parler de botanique c’est ressentir vibrer sa passion pour les végétaux. Il prend grand soin de chaque espace vert, chaque pot de fleurs, chaque feuille. Par exemple, alors que nous l’interrogeons, il frictionne précautionneusement entre ses doigts une à une les feuilles des plante. C’est pour améliorer la circulation de l’oxygène nous explique-t-il. Il poursuit en nous disant qu’il a appris cette technique de ses parents lorsqu’il était enfant. A cette époque, ils étaient cultivateurs de tabac, son père a répété pendant plus de soixante-dix année ce petit geste à chaque feuille. Son père le mettait en garde « Si tu ne fais pas ce travail chaque jour, à la fin de l’année tu seras ruiné ! ». La Nature est pour Jerry comme un nouveau-né qui exige beaucoup de patience et d’attention. Bien que ça ne soit pas facile, par exemple à cause des postures physiques de travail, Jerry est heureux de travailler au sein de la Dream Community. Il est infiniment reconnaissant envers Gordon qui lui a offert cette possibilité. Il semble que toutes les plantes semblent aussi épanouies.

Extrait de notre petit spectacle avec les membres de la Dream Community

       Dans cette même catégorie des profils atypiques, il y a également l’autre Jerry (celui que nous qualifions de « Coordinateur général »). Avant d’intégrer la Dream Community il y a trois ans, il travaillait au sein d’une banque pas très loin. Il passait chaque matin avec une curiosité toujours plus grande et discutait avec les artistes. Un jour il s’est décidé à parler avec Gordon, d’abord peu enclin à embaucher quelqu’un de son milieu professionnel, Jerry a fait preuve d’une grande motivation qui a convaincu Gordon. Comme il nous l’explique « J’ai crée mon job au sein de la Dream Community ». D’une certaine manière il supervise les projets, il est l’intermédiaire technique et de coordination de tous. Pour l’épauler sur le plan technique, il peut compter sur Paul. Ancien marin, il est dorénavant le régisseur général du lieu. C’est avec lui notamment que nous avons eu à faire pour notre court spectacle. Par ailleurs il y a l’équipe administrative composé majoritairement de Wu Shu Chu, Jane, Ango et Jessie. Ils travaillent à la fois à l’administration, la production et la communication du lieu. Aussi il y a la fabuleuse Peng Wahting. Si elle est sourde, cela ne l’empêche pas de s’occuper de l’accueil et l’entretien de la propreté du lieu. Elle a une énergie incroyable.  Enfin il y a Natha, le français de l’équipe. En plus de superviser et réaliser la création de l’étage français, il s’occupe de l’accueil des personnes en workaway. C’est grâce à lui que nous avons pu venir à la Dream Community, et c’est avec lui que nous avons créer notre petit spectacle.

        Entre chaque équipe il y a une certaine synergie, tous le monde se connaît notamment grâce aux poses repas communes. D’ailleurs les nouveaux, comme Véréna (artiste peintre allemande arrivée à la fin de notre séjour) ou comme nous, sont présentés à tous le monde au moment d’un repas. D’une certaine manière, la Dream Community est une grande famille. Le projet est en tout point fantastique et extra-ordinaire de part sa conception. L’idée de Gordon Tsai est très originale et démontre à quel point, la

Lors de notre fête de départ !

création artistique peut-être ingénieuse, pérenne et profiter à tous. De notre point de vue, nous avons pris un immense plaisir à y travailler, à développer un spectacle court en incluant toute l’équipe lors du tableau final. La Dream Community est un bel exemple de réussite qui mériterait d’être plus connue, plus rependue. C’est un projet merveilleux qui nous l’espérons en inspirera d’autre à travers le monde.

Adresse : Dream Community, N°. 42, Huqian Street ,Xizhi District, New Taipei City, Taïwan