Le Théâtre Butoh-kan

Où aller voir du Butō* au Japon ?

               Au cours de notre voyage au Japon, nous avions contacté l’équipe du Théâtre du Butoh Kan (unique théâtre au Japon dédié à la danse Butō) dans l’espoir de les rencontrer eux et éventuellement les artistes. Abel Coelho (chargé de production et créateur lumière pour le lieu, chorégraphe avec sa compagnie) nous avait répondu favorable, très enthousiaste de notre démarche. Avant d’entamer notre voyage, découvrir le Butō était pour nous une priorité. Alors avoir la chance en plus d’interroger des danseurs, c’était un rêve que nous n’aurions pas osé.

             Ainsi, début décembre 2017, nous rencontrions l’équipe du lieu et les artistes un à un. Courant janvier 2018, nous achevions l’écriture des articles. Cependant, lorsque nous recontactions Abel pour les lui présenter et avoir son aval, nous apprenions par l’intermédiaire de Rino Takabatake (directrice de production et créatrice sonore) son décès soudain une semaine après notre départ de Kyoto. Cette nouvelle fut brutale et d’une immense tristesse. C’est grâce à Abel, sa gentillesse, son ouverture d’esprit, sa bienveillance, toute cette incroyable semaine au sein du Butoh Kan a été possible grâce à lui. C’était une personne extraordinaire. Merci de nous avoir offert une si belle expérience, singulière et intense du Butō. Nous dédions ces articles à sa mémoire.

(nous avons choisi de ne pas modifier l’écriture de nos articles)

Adresse :

Butoh-kan Theater 123 Tsukinukecho (Koromotanadori), Nakagyo Ward, Kyoto, Kyoto Prefecture 604-8202 Japon

https://www.butohkan.jp/

Contact info@butohkan.jp

https://www.youtube.com/watch?v=3yHXjsVuWKA

                       Nous avons le plaisir de vous présenter un lieu peu ordinaire qui gagne à être à connu : le théâtre du Butoh-kan à Kyoto. Si vous avez la chance de passer à Kyoto, n’hésitez pas à aller voir un spectacle là-bas. Comme son nom l’indique, ce lieu est dédié à la danse Butō. Unique théâtre au Japon dédié à cette danse.

                  Brièvement, le Butō est une danse contemporaine née au Japon à la fin des années cinquante à l’initiative de Tatsumi Hijikata et Kazuo Onho. Rompant avec les esthétiques traditionnelles japonaises très codifiées et limitatives sur les mouvements du corps, le Butō est au contraire une exploration profonde des mouvements et de la recherche spirituelle. Très fort visuellement, notamment à cause du fait que les danseur-se-s se maquillent très fréquemment tout en blanc et que les chorégraphies sont esthétiquement très fortes, le Butō acquiert très vite une grande réputation mondiale. Elle est perçue comme une danse d’ Avant-Garde par son genre nouveau, à rebours de tout courant. Pourtant elle est et reste au Japon comme un art de second plan, n’obtenant jamais la reconnaissance nationale qu’elle a eu hors de ses frontières. Il est plus aisé

Kura, le petit espace utilisé par le butoh-kan

d’assister à un spectacle du Butō hors du Japon qu’en l’intérieur des terres du pays du soleil levant où cela est compliqué.

                 Pour remédier à cela, la compagnie Art Complex a ouvert en juillet 2016 un lieu spécialement dédié à l’art du Butō. Dans une petite Kura (qui signifie entrepôt de terre cuite) originale et héritée de la dernière moitié Edo (1603-1868), d’une jauge de huit à dix spectateurs, le lieu accueille chaque semaine trois spectacles (mardi, jeudi et samedi). Le Butoh-kan s’est associé à trois artistes -Yurabe Masami, Ima Tenko et Fukurozaka Yasuo- afin de leur offrir un espace permanent de représentations pour qu’ils puissent poursuivre leur pratique sereinement. L’idée du Butoh-kan est d’offrir un lieu dedié au Butō en même temps qu’un espace de travail à ces trois artistes danseurs. Le projet s’inscrit dans une dynamique plus globale menée par Keito Kohara, le producteur de la compagnie Art Complex, qui entend faire de la rue Sanjo à Kyoto une rue dédiée au spectacle vivant contemporain japonais (il a ouvert et réussi à pérenniser le Théâtre Gear, voir article).

                       Pour notre étape au Japon, nous tenions absolument à aller voir du Butō. Notre projet De soie et de scène est de mêler les arts de la scène et le voyage, or il n’est pas toujours facile de trouver les informations pour voir un spectacle de qualité dans un pays que nous découvrons. Où aller, faire coordonner les dates, rencontre possible avec l’artiste… Dans notre recherche pour le Butō au Japon, nous avons été doublement étonnés : premièrement de découvrir que le Butō n’est pas du tout répandu, d’autre part qu’il y avait une seule salle de spectacle dédiée à cet art au Japon. Heureusement le site internet du Butoh-kan est très clair, traduit en anglais. De plus, l’équipe d’accueil est fantastique.

Abel Coelho et Rino Takabatake devant le décor du spectacle de Fukurozaka Yasuo

                   L’équipe du Butoh-kan via Abel Coelho (chargé de production et qui s’occupe aussi de la création lumière) a répondu très rapidement favorablement à notre demande de rencontrer les artistes et les personnes travaillant sur le lieu. Abel Coelho est d’une formidable gentillesse. Nous avons assisté aux trois spectacles qui sont trois univers complètement différents. De plus, nous avons eu la chance de rencontrer les trois artistes tout aussi singuliers. Nous avons aussi pu découvrir le travail de Abel Coelho et Rino Takabatake (la directrice de production et créatrice des effets sonores). Exceptés les artistes, tous les membres de la compagnies Art Complex ont une double-casquettes administrative et technique, les arts du spectacle étant faiblement subventionnés au Japon (le lieu reçoit presque rien), la polyvalence est primordiale (dans notre article sur le Gear Theater, nous reviendrons plus amplement sur ces sujets notamment avec des entretiens avec Abel Coelho et Rino Takabatake). Mais l’énergie de chaque membre de la compagnie Art Complex confère au projet une singularité propre très enthousiasmante.

                De notre côté de spectateur, cette expérience a été incroyable, les spectacles sont très différents les uns des autres. Leurs esthétiques sont si particulières que la petite pièce de la Kura nous a semblé chaque fois un autre lieu. D’autant que sur un plan technique, la salle est peu pourvue. Quelques F1 ci et là, des petites enceintes. C’est une chance inouïe d’avoir assisté à ces trois beaux moments de scènes. Nous ne pouvons que vous conseiller chaudement de découvrir ces spectacles qui sont les mardi, jeudi et samedi à 18h et à 20h. Il est préférable de réserver avant de venir à cause du faible nombre de place par représentation (cela se fait facilement) et de vérifier les horaires sur leur site internet. Le Butoh-kan est un théâtre unique dans le monde, le kura et la proximité avec le spectacle sont une intense expérience de spectateur.

* Butō : c’est l’orthographe française de cette danse (en anglais Butoh)